2011-05-31 17:24:55

Rencontre des responsables catholiques des relations avec l’islam en Europe


MESSAGE DE BIENVENUE
AUX PARTICIPANTS DE LA RENCONTRE DE TURIN

Turin – Mardi 31 mai 2011

Eminence,
Excellences,
Chers Pères, Chers amis,

Je suis heureux de vous saluer ce soir au nom du cardinal Peter ERDÖ, archevêque de Budapest-Esztergom et président du Conseil des Conférences épiscopales d’Europe, et de vous remercier d’avoir accepté notre invitation. Je remercie tout particulièrement le cardinal Jean-Louis TAURAN, qui nous fait la joie d’être avec nous pour la deuxième fois et qui nous fait bénéficier de sa réflexion. Nous savons combien celle-ci est nourrie par toutes les rencontres internationales qu’il a eues ces derniers temps mais aussi par le travail fourni par cet observatoire de premier plan qu’est le Conseil pontifical pour le dialogue interreligieux.

J’adresse également mes vifs remerciements à Mgr Cesare NOSIGLIA, archevêque de Turin, pour son accueil, ici, dans son diocèse et pour ses paroles de bienvenue. Je remercie aussi Mgr Piergiorgio DEBERNARDI et le Père Andrea PACINI qui s’est beaucoup investi dans la préparation de cette rencontre. Nous sommes heureux d’être à Turin, un lieu où le dialogue interreligieux est vivant, et dans une région, le Piémont-Val d’Aoste, qui compte quelques bons connaisseurs de l’Islam et du monde musulman.

Les questions posées par l’inscription des communautés musulmanes sur l’horizon européen, les problèmes de leur reconnaissance institutionnelle par les Etats, les avancées du dialogue interreligieux intéressent toutes les Eglises chrétiennes. Le CCEE et la KEK ont eu l’occasion d’échanger leurs réflexions en ce domaine et de prendre des initiatives communes. Je pense à la rencontre chrétiens-musulmans de Malines, en Belgique, les 20-23 octobre 2008. Chaque année le Joint Committee qui réunit nos organismes est l’occasion de faire le point sur la situation et de nous informer sur nos initiatives respectives.

Parallèlement à ces échanges, un nouveau besoin s’est fait sentir, celui de permettre aux évêques et aux responsables du dialogue avec l’Islam au sein de nos conférences épiscopales de se retrouver pour échanger leurs informations et réfléchir ensemble sur les questions posées par l’insertion des communautés musulmanes dans nos sociétés européennes. Le CCEE a pensé qu’il était de sa mission d’offrir cet espace de rencontre au niveau de l’Europe, de la Grande Europe. Une initiative a été prise par la présidence du CCEE et c’est ainsi que s’est tenue une première rencontre de tous ces délégués pour le dialogue avec l’Islam, à Bordeaux, les 27 et 28 avril 2009. La rencontre, je crois, a été appréciée et les participants ont exprimé le désir qu’elle ait une suite. Le rythme d’une rencontre tous les deux ans a été alors adopté. Après cette rencontre qui a permis de faire le point sur la situation du dialogue chrétiens-musulmans dans nos différents pays, on a suggéré que la prochaine réunion puisse se centrer sur des points plus précis. C’est ce qui a été fait. Vous avez pu vous en rendre compte en lisant le programme de cette rencontre et le questionnaire préalable envoyé pour sa préparation.

Les deux thèmes retenus pour notre rencontre de ces jours sont : Eglise – Etat – Islam en Europe et la montée de l’islamophobie ou de la peur de l’Islam dans les communautés chrétiennes et dans la société aujourd’hui. Le contenu de chacun de ces thèmes va être présenté tout à l’heure. Je ne m’y arrête donc pas. Qu’il me soit permis simplement d’en souligner ici l’actualité. Beaucoup d’états essaient d’entrer en dialogue avec les différentes communautés musulmanes et souhaitent leur donner un cadre institutionnel. Mais, cet effort se heurte aujourd’hui aux tensions ethniques, nationales ou idéologiques qui traversent ces communautés musulmanes. L’Eglise catholique est concernée par cette question, non seulement parce que cette institutionnalisation de l’Islam pose des problèmes pratiques (mise en place d’aumôneries musulmanes à côté d’autres aumôneries) mais aussi parce que la référence à l’Eglise catholique sert souvent de modèle pour penser les relations entre l’Etat et les diverses religions.

La peur de l’Islam et une certaine islamophobie se font également sentir dans nos sociétés européennes. Cela est lié à un faisceau de raisons complexes : terrorisme international, situation des minorités chrétiennes dans certains pays musulmans, visibilité sociale plus grande des musulmans en Europe, modification du paysage symbolique d’un certain nombre de nos pays. Le populisme qui a le vent en poupe dans certaines élections européennes s’accompagne souvent d’un mouvement de rejet de l’Islam où se mêle inextricablement refus de l’immigration et refus de l’Islam. Cette attitude peut également se rencontrer dans les communautés chrétiennes, en particulier dans le discours de ceux qui se demandent si avec l’Islam ne se renouvelle pas la connivence autrefois entretenue avec le marxisme. Nous aurons à analyser tout cela de plus près.

Je rappelle le but de notre travail. L’objectif de notre rencontre est de nous informer mutuellement mais aussi, comme le dit le vademecum de préparation, de « définir une perspective commune sur les principes fondamentaux et la méthode à suivre pour que l’Eglise puisse adopter, par le biais des Conférences Episcopales d’Europe, une position commune sur les principales questions qui se présentent à elle du fait de la présence croissante de l’islam dans la vie publique en Europe ».

Si ces deux thèmes que nous allons travailler ont déjà été évoqués brièvement lors de notre rencontre à Bordeaux, il y a eu des événements qui se sont produits depuis et qui n’étaient pas, eux, totalement prévisibles : je fais référence aux mouvements de révolution qui ont marqué ces derniers mois bien des pays arabes : la Tunisie, l’Egypte, le Yémen, la Lybie et la Syrie. Nous ne pouvons pas ne pas tenir compte des conséquences de ces révolutions dans notre réflexion, ne serait-ce que par les mouvements migratoires qu’elles provoquent. Nous sommes heureux d’avoir avec nous ces jours-ci, un évêque d’un de ces pays, Mgr Maroun LAHHAM, archevêque de Tunis. Je le remercie d’avoir accepté notre invitation et d’apporter ainsi à notre réflexion un éclairage extérieur à l’Europe, un point de vue qui nous sera particulièrement précieux.

Il ne me reste plus maintenant qu’à vous souhaiter pendant ce séjour à Turin un bon et fécond travail !

Jean-Pierre cardinal RICARD
Archevêque de Bordeaux
Vice-président du CCEE








All the contents on this site are copyrighted ©.