Ben Laden éliminé : les chrétiens doivent-ils avoir peur ?
La communauté internationale redoute des représailles après l’annonce de la mort d’Oussama
Ben Laden, tué au Pakistan par un commando des forces spéciales américaines. Plusieurs
pays ont considérablement renforcé leurs mesures de sécurité. Les chrétiens pakistanais,
en particulier, ont peur d’être la cible d’attaques. Le directeur de la CIA s’est
dit presque certain que les cellules d'Al-Qaïda allaient chercher à le venger. Tout
en saluant la mort de Ben Laden, les pays occidentaux estiment que la lutte antiterroriste
devra se poursuivre. Les minorités chrétiennes, qui vivent dans les pays à majorité
musulmane, doivent-elles avoir peur ? Mathilde Auvillain a posé la question à Mgr
Michael Fitzgerald, ancien président du Conseil pontifical pour le Dialogue interreligieux
et actuellement nonce apostolique au Caire Écoutez
La mort de
Ben Laden est perçue comme une « victoire » américaine dans la guerre contre le terrorisme.
Depuis qu’il avait échappé il y a dix ans à l'intervention des troupes américaines
en Afghanistan, Ben Laden avait été localisé pour la dernière fois par des témoins
en novembre 2001 à Kandahar dans le sud afghan, mais c’est finalement au Pakistan
que les hommes de la CIA l’ont retrouvé. Quelles conséquences pourra avoir la disparition
de Ben Laden sur la progression du terrorisme dans le monde? Et sur la politique étrangère
et de défense américaine ? L’analyse d’Yves Boyer, directeur adjoint de la fondation
pour la recherche stratégique, interrogé par Charles-François Brejon
L’annonce
de la mort d’Oussama Ben Laden, tué par des forces spéciales américaines, à une soixantaine
de kilomètres d’Islamabad, suscite des sentiments mitigés parmi les chrétiens pakistanais.
La petite minorité chrétienne pourrait être prise pour cible. Les instituts missionnaires
catholiques au Pakistan ont été mis en alerte, face aux risques de représailles. Les
écoles chrétiennes ont été fermées. La présence des forces de l’ordre autour des églises
et dans les quartiers chrétiens a été renforcée, notamment dans les grandes villes,
Islamabad, Lahore et Karachi. Selon le directeur des Œuvres pontificales missionnaires,
tout peut servir de prétexte pour attaquer les chrétiens, souvent associés par la
propagande islamiste aux Etats-Unis et à l’occident. Paul Bhatti, frère du ministre
catholique des minorités tué il y a un mois, s’est dit préoccupé des conséquences
pour la minorité chrétienne. Le président de la commission épiscopale pakistanaise
pour le dialogue interreligieux, a indiqué avoir rencontré les autorités civiles et
militaires du pays pour discuter avec eux des mesures à prendre pour assurer la sécurité
des chrétiens. Dans une interview à l’agence Fides, de la Congrégation vaticane pour
l’Évangélisation des peuples, il a affirmé qu’il leur avait proposé l’exemple de Jean-Paul
II, homme de dialogue et de paix. Dimanche une célébration interreligieuse a été organisée
au Pakistan en l’honneur du nouveau bienheureux. Dans un communiqué, l’archevêque
émérite de Lahore, Mgr Lawrence Saldanha, se dit confiant : il estime que la mort
du leader d’Al-Qaïda pourra contribuer à démystifier le radicalisme militant et réduire
la tension et l’intolérance au Pakistan. D’autres pensent au contraire que les islamistes
radicaux sont trop bien implantés dans le pays pour que la mort de Ben Laden l’affaiblisse.
Des milliers d’écoles coraniques sont contrôlées par les talibans.
Marc Fromager
est directeur d'AED, Aide à l'Eglise en Détresse. Il est interrogé par Mathilde Auvillain
Le Saint-Siège
n'a pas tardé à réagir, par le biais d'un communiqué du père Federico Lombardi, directeur
de la salle de presse du Saint-Siège. «Oussama ben Laden, comme chacun sait, porte
la grave responsabilité d’avoir répandu la division et la haine entre les peuples,
provoquant ainsi la mort d’innombrables innocents, et d’instrumentaliser les religions
à cette fin. Face à la mort d’un homme, un chrétien ne se réjouit jamais, mais
il doit réfléchir aux graves responsabilités de chacun devant Dieu et les hommes,
et il espère et s’engage afin que chaque événement soit, non pas l’occasion d’une
ultérieure escalade de la haine, mais celle de la paix.»
Cette conviction est
partagée et promue par Pax Christi Italia. Marie-Agnès Georges a interrogé le père
Renato Sacco, conseiller dans ce mouvement catholique.