Si, en 2010, la Turquie n’a guère avancé dans son ambition d’intégrer l’Union Européenne,
elle a sensiblement évolué dans sa relation avec les minorités chrétiennes du pays.
Les gestes positifs du gouvernement islamo-conservateur de l’AKP ont été globalement
acceptés par les communautés orthodoxes grecques et arméniennes. Malgré l’inquiétude
soulevée par cette main tendue d’Ankara dans les rangs pro-laïcs turcs, des célébrations
ont notamment été autorisées, au monastère de Souméla le 15 août dernier, une première
depuis les années 20, ou encore dans l’église d’Akhtamar en septembre. Et alors que
la question des expropriations demeure un sujet de tension récurrent entre l’État
et les minorités chrétiennes, la restitution de l’orphelinat de Büyükada fin novembre
au Patriarcat œcuménique, saisi treize ans plus tôt, a été qualifié d’ « historique
» par les juristes chargés du dossier. Sébastien de Courtois, chercheur à l’École
pratique des hautes études et spécialiste des minorités en Turquie, revient sur cet
épisode, dans un paysage qui semble s’éclairer, mais qui garde ses zones d’ombres.
Un entretien réalisé
par Charles-François Brejon.