Le commentaire de l'Évangile du 18e dimanche ordinaire
Le Père Jean-Côme About commente l'Evangile, selon saint Luc (12,13-21) de ce 18e
dimanche du temps ordinaire.
Le texte du
commentaire : L’évangile de ce dix-huitième dimanche du temps ordinaire
nous invite à opérer la distinction fondamentale entre l’être et l’avoir dans notre
vie. Jésus vient juste d’invectiver les pharisiens et les légistes sur leur rôle respectif
en fustigeant leurs attitudes hypocrites qui dépossèdent et infantilisent ceux à qui
est destinée la Parole de Dieu. « Malheureux êtes-vous d’avoir agi ainsi ! » Et Jésus
de mettre en garde ses disciples contre le levain corrupteur de ces gens-là. Devant
une foule de plusieurs milliers de personnes, un homme se lève et demande justice
pour un héritage. Jésus pourrait faire quelque chose pour rétablir l’harmonie et la
paix mais sa réponse fuse : «Qui m’a établi pour être juge et faire vos partages ?»
Jésus refuse d’intervenir et pourtant combien savons-nous que la haine peut s’insinuer
dans les cœurs lors des partages d’héritage dans les fratries ! Car ce qui préside
ces événements est souvent l’âpreté au gain, justifiée par une justice toute matérielle
et qui ne tient plus compte des vies et des cœurs. Jésus nous invite alors
à une distinction essentielle : celle de l’avoir et de l’être. L’être est la vie et
l’existence de l’homme, l’avoir est la fortune plus ou moins grande qui lui permet
de continuer à vivre. Jésus avertit simplement : l’homme ne doit pas faire
du moyen, l’avoir, un but, ni identifier la signification de son être avec l’augmentation
des ses moyens. Juge-t-on une vie, une personne dans son être, à la quantité de sa
fortune ? La réponse, dans notre monde, pourrait, nombre de fois s’apparenter à un
oui mais notre cœur nous rappelle que cela est faux. L’absurdité de cette identification,
avoir et être, ne jaillit que lorsque l’on évoque la mort - on n’emporte rien dans
la mort - mais surtout devient flagrante lorsque l’on sait que l’on devra se présenter
devant Dieu et répondre de sa vie. «Cette nuit-même, on te redemande ta
vie. Et ce que tu as mis de côté qui l’aura ?» En présence de Dieu, ce qui importe
ce n’est pas la quantité de l’avoir mais la quantité de l’être. C’est pourquoi Jésus
précise en Matthieu (6,19) : «Ne vous amassez point des trésors sur la terre, où la
mite et le ver consument… Mais dans le ciel.» Et dans une vie cela tient
à un petit mot : «soi». Qui veut posséder amasse ses trésors «pour soi» ;
qui a un « «être » de grande valeur renonce à ce « soi » et pense à son être auprès
de Dieu. Dieu est le trésor. «Où est ton trésor, là est ton cœur» (mt 6,21).
Si Dieu est notre trésor, nous devons être aussi intimement convaincus
que la richesse infinie de Dieu consiste dans son don d’amour et son dépouillement
de soi, donc qu’elle est le contraire de toute volonté d’avoir. St Paul
nous le rappelle aussi dans la deuxième lecture : «Recherchez donc les réalités d’en-haut :
c’est là qu’est le Christ, assis à la droite de Dieu». Que notre temps de
repos, de vacances ou de travail soit le temps du choix de Dieu, du choix de l’être,
uni dans le Christ et rendu un en lui et non pas le temps de l’être éclaté, éparpillé
par la multiplicité des faux besoins suggérés de l’avoir et que rien ne vient jamais
combler durablement.