Intervention de Mgr Maroun Elias LAHHAM, Évêque de Tunis (TUNISIE)
S. Exc. Mgr Maroun Elias LAHHAM, Évêque de Tunis (TUNISIE)
Mon intervention
est au sujet des relations avec l'Islam en Afrique. Le premier point à noter est que
l'Instrumentum laboris parle de l'Islam dans un seul paragraphe (102), en des termes
génériques et qui touchent l'Islam en Afrique subsaharienne. Or, la très grande majorité
des musulmans africains vit en Afrique du Nord, zone géographique totalement absente
dans l’Instrumentum laboris. Un autre point est que près de 80% des 350 millions d'arabes
musulmans vivent dans les pays de l'Afrique du nord. Ceci pour dire que les rapports
islamo chrétiens en Afrique du Nord sont différents de ceux de l'Europe et de l'Afrique
subsaharienne, et même des pays arabes du Moyen Orient. Ce survol des Églises de l'Afrique
du Nord lorsqu'on parle de l'Afrique, et surtout de l'Islam nous surprend; nous l'avons
fait savoir aux instances compétentes. La spécificité des relations islamo chrétiennes
dans les Églises de l'Afrique du Nord peut enrichir les expériences de dialogue vécues
ailleurs (en Europe ou en Afrique subsaharienne) et désamorcer les réactions de peur
et de refus de l'Islam qu'on commence à ressentir dans certains pays. Nous savons
tous que la peur est une mauvaise conseillère. En quoi consiste la spécificité
de l'expérience des Églises de l'Afrique du Nord? C'est une Église de la rencontre.
Même si elle n'a pas toute la liberté qu'elle souhaiterait, elle n'est pas persécutée.
C'est une Église qui vit dans des pays musulmans à presque 100%, et où l'écrasante
majorité de ses fidèles est composée d'étrangers qui ne restent, pour la plupart,
que quelques années. - C'est une Église qui, depuis l'indépendance des pays de
l'Afrique du Nord, s'est fortement engagée dans le service humain, social, culturel
et éducatif des pays qui l'accueillent. - C'est une Église qui jouit d'une marge
assez large de liberté pour l'exercice du culte chrétien pour les milliers de ses
fidèles, en Tunisie par exemple. C'est une Église qui vit dans des pays musulmans
où il y a un début de mouvement de pensée critique à l'égard d'un Islam rigoriste
et fanatique. Il y a même une école “maghrébine” d'étude rationnelle des textes et
des traditions musulmanes. - La collaboration de l'Église est souvent sollicitée
dans cette nouvelle manière de penser et de vivre l'Islam. Cette sollicitation est
demandée à des prêtres ou des évêques qui ont passé plusieurs années dans les pays
du Maghreb, et elle s'est accrue depuis la nomination d'évêques arabes dans certains
sièges épiscopaux. Deux propositions : - Que le synode pour le Moyen Orient
prévu pour octobre 2010 comprenne aussi les diocèses de l'Afrique du Nord, surtout
en ce qui concerne les minorités chrétiennes et les rapports et le dialogue avec l'Islam. -
Un colloque sur l'Islam en Afrique et qui tienne compte de la variété des expériences
africaines, allant de Tunis jusqu'à Johannesburg.