Première messe de Benoît XVI en terre africaine : “Dieu vous aime ; il ne vous oublie
pas”
Ils étaient quelque 60 000 sur le stade de Yaoundé avec leur enthousiasme rayonnant,
massés sur les gradins noirs de monde, loin de la désinformation et des polémiques
souvent hypocrites qui ont la part belle en Occident et dont les populations africaines,
le plus souvent, ne savent que faire. Ces hommes et ces femmes d’Afrique, confrontés
à la pauvreté, aux maladies, aux guerres, à la corruption, à l’avidité de leurs dirigeants
accrochés au pouvoir, souvent avec la complicité de ces mêmes dirigeants occidentaux
qui s’indignent aujourd’hui des propos de Benoît XVI sur le Sida, rapportés et commentés
à la hâte, et qui en arrivent même à laisser entendre que l’Eglise catholique aurait
une part de responsabilité dans les ravages de la pandémie du Sida. Pour la messe
solennelle du Pape au stade de Yaoundé, ce jeudi matin, tous les épiscopats africains
étaient représentés, décidés à affronter un débat synodal autour de la justice, de
la réconciliation et de la paix, pour aider l’Afrique à panser ses blessures. De nombreux
fidèles étaient massés à l’extérieur. Dieu est avec vous – a lancé Benoît XVI
–, Il est avec les enfants soldats, avec les orphelins, avec ceux qui sont abandonnés
à la misère de la rue, enrôlés de force par des groupes militaires, avec les victimes
d’abus. Devant les difficultés de la vie – a affirmé le Pape - je voudrais vous dire :
Dieu est avec vous, il ne vous oublie pas. Et c’est surtout aux jeunes que Benoît
XVI a voulu s’adresser, pour les exhorter à avoir le courage de ne pas se laisser
séduire par les paradis artificiels éphémères importés de l’étranger. Il évoqué les
jeunes des mégapoles, déracinés, fragilisés, désœuvrés. Au Cameroun, comme dans le
reste de l’Afrique, a-t-il noté, la famille traverse un moment difficile : les valeurs
de la vie traditionnelle ont été bouleversées, les rapports entre les générations
se sont modifiés et ne favorisent plus comme avant la transmission du savoir et de
la sagesse hérités des ancêtres. Dans son homélie, le pape a par ailleurs évoqué
l’exode rural, qui se traduit pour beaucoup par la perte de la richesse intérieure.
Confronté au phénomène de l’urbanisation galopante, l’homme africain abandonne sa
terre, physiquement et moralement, dans une sorte d’exil intérieur qui l’éloigne de
son être de ses frères et sœurs et même de Dieu. C’était la première messe en plein
air célébrée par Benoît XVI sur le sol africain, pour la remise de l’Instrumentum
Laboris, le document de travail du prochain Synode Spécial pour l’Afrique, où la réflexion
sur la famille aura une place de choix. Le compte-rendu d'Hélène Destombes